Velours et veloutiers...
Velours et veloutiers,
Si nous en reparlions ?
Le veloutier est bien le tisseur qui fabrique le velours, mais pour ceux qui, comme moi qui ai un ancêtre veloutier, voudraient en savoir davantage, je me risque dans un petit développement après consultation de dictionnaire et encyclopédie, pour découvrir quelques grandes lignes de l'histoire du velours, puis un peu de la technique du veloutier.
Commençons par une définition.
Le velours, de latin "vilosus", velu, est une étoffe rase d'un côté et couverte de l'autre de poils dressés, très serrés, maintenus par les fils du tissu. Il y a le velours à deux, à trois, à quatre poils suivant qu'il est formé par des fils à deux, trois, ou quatre brins.
Les velours peuvent être exécutés en soie, en coton, en laine, en lin, en chanvre, en jute… mais nous nous arrêterons simplement au velours de soie qui concerne particulièrement les siècles que nous "labourons" et notre région, dans le rayonnement qui fut celui de Lyon à partir du XVI°.
Un brin d'histoire du velours.
Le velours serait, une invention des peuples d'Asie et d'Afrique…
Au Moyen-Âge ce tissu est fabriqué en Orient d'où il est importé pour être employé dans le costume ou l'ameublement. Au XII° siècle Venise et Gênes produisent aussi ces tissus recherchés, enrichis de broderies d'or ou d'argent. Au XV° siècle apparaissent les premiers velours rayés ou brochés. Le brochage consiste à passer dans une étoffe, lors du tissage, des fils d'or ou de soie qui forment un dessin en relief. Si Lyon, depuis longtemps, était un centre commercial pour la soierie importée d'Espagne et plus encore d'Italie, en 1450, Charles VII accorde à cette ville le monopole de la vente des étoffes de soie importées pour tout le Royaume. En 1466, Louis XI essaya d'implanter à Lyon une manufacture royale de tissus de soie et d'or, mais trois ans plus tard, il la transférait à Tours, les Lyonnais n'ayant pas perçu l' intérêt de la chose… C'est plus tard, sous l'impulsions de François 1° et l'arrivée à Lyon des piémontais Etienne Turchetti et Barthélemy Nariz qui montèrent vingt métiers de tissage, que Lyon devint la capitale de la Soie dans le Royaume avec sa fameuse "fabrique" (on dirait aujourd'hui sa "filière soie") rassemblant tous les acteurs du tissage et du commerce des étoffes de soie et son rayonnement dans les campagnes avec de nombreux "sous traitants".Avec le tissage de la soie, nos piémontais avaient aussi introduit la fabrication du velours notre précieuse étoffe. Au XVII° siècle Claude Dangon, ouvrier en soie lyonnais, invente le métier "à la grande tire" qui permet le tissage des façonnés qui, jusque-là, venaient d'Italie et la réalisation d'étoffes, donc de velours, de plusieurs couleurs avec des dessins compliqués. Ce métier subsistera jusqu'à l'invention du métier Jacquard au tout début du XIX° siècle.
Et maintenant un brin de technique,
pour approcher le travail de nos premiers veloutiers.
La technique du tissage est, pour moi, très compliquée, aussi vais-je m'en tenir au principe de base !
Le tissage c'est l'art d'entrecroiser des fils pour en faire des tissus…
Jusque-là tout le monde a compris !
Pour cela on distingue deux ensemble de fils :
Les fils de chaîne qui sont parallèles au sens d'avancement du tissu en cours de fabrication, et les fils de trame qui sont perpendiculaires à la chaîne…
Tout le monde a encore suivi, bravo !
Mais attention, cela va se compliquer !
Le velours de soie est toujours formé de deux chaînes : L'inférieure, chaîne de pièce, qui forme le bâti de l'étoffe et la supérieure, chaîne de peluche, qui s'entrelace avec la trame et la chaîne inférieure.
Le veloutier est muni de deux fines baguettes de métal, les fers qui, ronds d'un côté, présentent une rainure de l' autre. Il passe une de ces baguettes, rainure en haut, entre la chaîne inférieure et la chaîne supérieure de façon à ce que les fils de la chaîne de peluche forment, autour du fer et sur toute la largeur du tissu de fines bouclettes. L'ouvrier passe alors une lame très tranchante, le couteau, dans la rainure de la baguette afin de trancher les boucles qui se transforment alors en poils ou aigrettes… la trame qui continue, bloque alors ces fils de peluche, tandis que l'autre fer est déjà engagé pour la répétition de l'opération…
Vous avez certainement compris, car, même moi, j'y suis arrivé !
Il va de soi que la richesse et la qualité du velours dépendent autant de la hauteur et de l'égalité des aigrettes que de leur densité et le nombre de brin formant les fils… Ce travail "à la chaîne", sans jeu de mots, me laisse rêveur… imaginons nous en train de faire ce travail répétitif à longueur de
journée ! Bien sûr, on construisit par la suite des métiers mécaniques, mais il paraît que rien ne vaut le velours au fer… et son prix !
Je m'arrête là car d'autres explications seraient au delà de mes compétences et je pense que cette brève description est suffisante pour imaginer un peu le travail de notre veloutier.
M-R Lundi de Pâques 2007.
N-B : Le travail du velours n'est pas à confondre avec celui de la passementerie… ce dernier pourra faire l'objet d'une autre explication, car il y avait aussi de nombreux passementiers dans notre région.